Des reporters armés déjouent la sécurité de deux aéroports
Opérations de contrôle à l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle. Crédits photo : JACK GUEZ/AFP
Deux journalistes ont réussi à voyager avec un pistolet sans attirer la vigilance des services de sécurité à Marseille et Roissy-Charles-de-Gaulle, dans le cadre d'un reportage diffusé jeudi dans Envoyé Spécial. C'est pour illustrer les failles de sécurité dans les aéroports français, dont les fouilles aux portiques sont assurées par des sociétés privées, que deux journalistes travaillant pour le magazine
Envoyé Spécial ont voyagé en possession d'un pistolet semi-automatique de calibre 9 mm. A deux reprises le 8 novembre 2010, à Roissy-Charles-de-Gaulle le matin pour un vol vers Nice, et à Marseille-Marignane dans la soirée pour un avion à destination de Paris, les agents de sécurité n'ont pas décelé l'arme. Le pistolet, démonté en plusieurs parties, avait été placé dans deux bagages à main différents. Lors du vol retour, l'une des journalistes s'est filmée en train de remonter l'arme dans les toilettes de l'avion.
Le sujet, intitulé «Police privée: la sécurité au rabais», a été réalisé par les journalistes Linda Bendali et Mathieu Lere, de Ligne de Mire Productions. Diffusé jeudi soir, il remet en cause la compétence des entreprises privées chargées de la sécurité aéroportuaire. La formation des agents est notamment pointée du doigt. «Ils étaient attentifs, a
expliqué Linda Bendali sur
France Info. Mais il y a chez eux une méconnaissance des objets dangereux, car leur formation n'exige pas qu'ils les manipulent. Très peu d'agents de sûreté ont déjà manié un pistolet, l'ont déjà démonté et savent à quoi ça ressemble réellement».
Un audit sur la sécurité dans les aéroports réclaméLa Direction générale de la police nationale (DGPN) a indiqué qu'elle ne pouvait réagir sans avoir vu le reportage, tout comme Aéroports de Paris (ADP), qui gère Roissy-Charles-de-Gaulle, et l'aéroport de Marseille. «Cette affaire, si elle est vraie, démontre la perfectibilité du système et la nécessité de la présence de policiers lors de la formation des agents de sécurité, et pendant les fouilles», a réagi Patrice Ribeiro, le secrétaire général du syndicat policier Synergie-Officiers, qui n'a pas visionné les images. «Mais on ne peut pas revenir en arrière, le police ne peut pas se substituer aux sociétés de sécurité privées pour les fouilles dans les aéroports», a-t-il estimé.
«Cela démontre un véritable problème aujourd'hui, cette histoire de la sous-traitance de la sécurité à des sociétés privées, on a forcément des niveaux de sécurité de moindre niveau», a regretté de son côté le secrétaire général du syndicat policier Unité police SGP-FO, Nicolas Comte, qui n'a pas non plus vu le reportage. «Il faut absolument un contrôle de l'Etat sur les systèmes de fouilles», a-t-il ajouté, réclamant la tenue d'un «audit sur la sécurité dans les aéroports».