Paris - L'essence sans plomb et le fioul domestique pourraient être encore moins chers en France si les distributeurs ne profitaient pas du repli actuel des cours du pétrole pour augmenter leurs marges, estime l'association de consommateurs CLCV, que le secteur pétrolier accuse de mener un mauvais procès.
Les prix des carburants ont continué en décembre à battre des records à la baisse en plus de quatre ans, dans le sillage de la dégringolade des cours de l'or noir, qui a perdu près de la moitié de sa valeur depuis la mi-juin.
Mais selon la CLCV, les distributeurs tardent un peu à répercuter entièrement la chute du brut sur l'essence sans plomb et le fioul domestique, utilisé par plus de 4 millions de ménages pour se chauffer, ce qui entraîne une augmentation de la marge brute de transport-distribution.
Les prix ont diminué grâce à la baisse du baril, mais ils auraient pu baisser plus. Quand le prix du baril baisse, c'est une période propice à l'augmentation de la marge, parce que cela se voit moins, dénonce le délégué général de la CLCV, François Carlier, interrogé par l'AFP.
Cette marge brute équivaut à la différence entre le prix du litre de carburant commercialisé (hors taxes) et celui à la sortie de la raffinerie. Elle inclut les frais des distributeurs comme la logistique et les salaires.
Jusqu'à novembre, ça allait, mais au mois de décembre, les stations-service ont fait preuve d'une certaine dose d'opportunisme, poursuit M. Carlier. Les marges de distribution sur l'essence sans plomb et sur le fioul domestique ont augmenté depuis trois semaines et atteignent des niveaux trop élevés, alors que le recul du brut est généralement répercuté à la pompe en une dizaine de jours.
Lors de la troisième semaine de décembre, la marge atteignait 12,4 centimes/litre d'essence, contre 10,8 centimes en novembre et 9,4 centimes en moyenne depuis le début de l'année, selon la CLCV.
Pour le fioul domestique, elle s'élevait à 15,1 centimes/litre, contre 13,3 centimes en novembre et 12 centimes en moyenne en 2014.
C'est plus problématique pour le fioul, car les gens sont en train de remplir leurs cuves. Vu les quantités importantes en jeu, ce n'est plus un impact symbolique: 3 centimes en plus, c'est quelques dizaines d'euros en plus sur la facture, souligne M. Carlier.
- Situation temporaire -
Le secteur pétrolier a réfuté ces accusations, déplorant qu'on lui fasse un mauvais procès et assurant que le marché fonctionne normalement.
Cette situation est temporaire et va se résorber rapidement. C'est une affaire de quelques jours, précise le président de l'Union française des industries pétrolières (Ufip), Jean-Louis Schilansky.
Selon l'Ufip, la marge brute est particulièrement faible cette année, alors qu'elle s'élève historiquement à environ 11 centimes/litre, en raison notamment de la guerre des prix entre les grandes surfaces et les autres distributeurs.
Il ne s'agit donc pas d'une rétention délibérée, car c'est un marché extrêmement concurrentiel, soutient M. Schilansky, ajoutant qu'un rapport gouvernemental avait estimé en 2012 à environ 1 centime/litre le bénéfice réel des distributeurs pétroliers (la marge nette).
La CLCV rappelle que les distributeurs s'étaient engagés à ne pas pratiquer des marges de distribution excessives en cette période de baisse du prix du baril, lors d'une réunion début décembre à l'Elysée, qui avait alors estimé que la baisse du pétrole était correctement répercutée sur les prix des carburants.
D'autant plus que d'autres facteurs viennent aussi freiner la baisse des prix à la pompe, comme la dévalorisation de l'euro et les taxes, qui représentent plus de la moitié du prix de vente.
La fiscalité sur le gazole augmentera de 4 centimes par litre (hors TVA) le 1er janvier, la moitié pour financer l'abandon de l'écotaxe et l'autre dans le cadre de la taxe carbone, qui concernera aussi l'essence à hauteur de 1,8 centime/litre.
Pour le gazole en revanche, la CLCV observe que la marge de distribution est assez stable, entre 8 et 9 centimes par litre. Cela peut s'expliquer par des ajustements de prix plus rapides au vu des importants volumes écoulés (80% du marché français).
(©AFP / 26 décembre 2014 17h02)
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