D'après un rapport des scientifiques du National Marine Fisheries Service, le lion de mer de Steller serait bel et bien menacé. Sa disparition pourrait être évitée en limitant la pêche, qui appauvrit la mer en nourriture.
Proche de l’otarie, le lion de mer porte bien son nom. Ses yeux dorés, son cou épais ressemblant à une crinière et son cri proche d'un rugissement sont à l’image du roi de la savane. Pourtant, il a semble-t-il perdu son trône de roi des mers, car l'ensemble des espèces appelées lion de mer semblent menacées.
C'est donc aussi le cas du lion de mer de Steller (Eumetopias jubatus), du nom du scientifique allemand Georg Wilhelm Steller qui l’a décrit pour la première fois en 1741. Imposants, son poids et sa taille (une tonne et plus de trois mètres de long pour le mâle) le placent en troisième position des pinnipèdes les plus gros, derrière le morse et l’éléphant de mer. Cette espèce vit dans le Pacifique Nord, et on le retrouve depuis le sud de la Californie jusqu’au nord du Japon en passant par l’Alaska et les côtes russes. Les îles Aléoutiennes, archipel de 300 îles qui s’étendent sur 1.900 kilomètres entre la péninsule d’Alaska et le large de la péninsule du Kamtchatka, abritent une bonne partie des individus.
Des scientifiques ont tiré la sonnette d’alarme dans un rapport nommé Groundfish Biological Opinion. Depuis les dernières décennies, les populations des lions de mer de Steller diminuent dramatiquement. Cette diminution touche l'ensemble des régions orientales de son habitat, sans que les populations à l’ouest ne soient affectées.
D’après ce rapport de la National Marine Fisheries Service (NMFS), la population aurait diminué de 45% entre 2000 et 2009 dans les îles Aléoutiennes les plus occidentales, et le taux de natalité aurait quant à lui diminué de 43%, bien que l’espèce soit protégée par le Endangered Species Act américain depuis 1990. Au dernier recensement datant du printemps dernier, les colonies comptaient environ 1.000 individus dans les îles Aléoutiennes occidentales. Leur diminution serait actuellement d’environ 7% par an.
La natalité des lions de mer de Steller a fortement diminué ces dernières décennies, de même que le nombre d'individus. Les photos de bébé lion de mer, comme celle-ci, deviennent donc de plus en plus rares. Crédits DR
Moins de nourriture, moins de bébés
Pire, entre 1960 et 1980, la chute aurait même atteint les 80%. La mortalité des lions de mer dans les filets des pêcheurs ainsi que leur chasse autrefois autorisée expliquent ces chiffres. Maintenant protégée, l’espèce n’est plus directement ciblée mais la diminution de la population continue pourtant de progresser.
Le rapport accuse l’homme d’être à l’origine de la disparition de l’espèce. En effet, la pêche est intensive dans cette région du Pacifique : presque& deux millions de tonnes de poissons des fonds (cabillaud, colin, maquereau d’Atlka) sont pêchés chaque année dans les eaux entourant les zones d’habitat des lions de mer (Golfe d’Alaska, mer de Bering).
Or les lions de mer se nourrissent exclusivement de ces sortes de poissons, précisément dans ces mers, tout comme d’autres poissons et céphalopodes. Cela porte à croire que la pêche, et donc la compétition pour la nourriture, serait à l’origine de leur disparition, même si le lien de cause à effet n’a pas encore pu être prouvé. Cependant, si rien n’est fait, l’espèce semble vouée à l’extinction.
Les recherches des causes de cette diminution effrayante ont ratissé large : du réchauffement climatique en passant par les maladies ou les préférences alimentaires des baleines carnivores… Mais le manque de nourriture paraît, selon les scientifiques, l’explication la plus vraisemblable pour expliquer la forte baisse de la natalité. Alors qu’en 1979, 1.142 naissances avaient été recensées sur un îlot rocheux de l'archipel, un seul bébé est né cette année.
Les recommandations de la NMFS sont claires : limiter la pêche du cabillaud et du maquereau autour des îles habitées par les lions de mer et limiter davantage les saisons de pêche autorisée, en omettant toutefois de parler de la pêche du colin. Les pêcheurs ont déjà fait entendre leur mécontentement et risquent de récidiver au prochain congrès du .North Pacific Fishery Management Council