Ces virus émergents qui nous menacentPar: rédaction
14/08/14 - 10h25 Source: AFP
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Sida, SRAS, H1N1, Ebola : régulièrement surgit la menace d'un nouveau virus, favorisé par la pression démographique, l'évolution des modes de vie ou le réchauffement climatique.
"Les maladies virales émergentes sont en augmentation, essentiellement en raison de la densité et de la mobilité des populations", résume Arnaud Fontanet, responsable de l'unité d'épidémiologie des maladies émergentes à l'Institut Pasteur à Paris. Même constat pour le Pr Jean-François Delfraissy, directeur de l'Agence française de recherche sur le sida qui souligne que les virus émergents "arrivent essentiellement des pays du sud soit d'Asie, soit d'Afrique" et que leur propagation dans le reste du monde est grandement facilitée par les voyages en avion.
154 nouvelles maladiesSelon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), 154 nouvelles maladies virales ont été découvertes entre 1940 et 2004 dont les trois-quarts sont des infections transmises de l'animal à l'homme (ou zoonoses) comme dans le cas du virus du sida : transmis à l'homme au début du 20e siècle par des chimpanzés en Afrique, il a été à l'origine de l'une des épidémies les plus meurtrières des cinquante dernières années, avec près de 40 millions de morts. Les maladies émergentes peuvent également être causées par des "mutations ou des recombinaisons virales" observées notamment dans les virus de la grippe.
Un virus peut enfin "émerger" dans une région où il était jusque là totalement absent, parce que des malades ou des animaux ont traversé des frontières et touché des populations non immunisées, devenant du même coup plus virulent: le meilleur exemple reste celui du virus du Nil occidental, transmis par des moustiques. Isolé en 1937 en Ouganda, puis signalé au Moyen Orient dans les années 50, il a été introduit en 1999 en Amérique du nord où il s'est rapidement propagé et a fait des centaines de victimes, généralement des suites d'une méningite ou d'une encéphalite.
Des virus longtemps confinésMais avant de s'attaquer à l'homme, les virus peuvent rester très longtemps confinés dans un réservoir animal, en général des oiseaux sauvages ou des chauves-souris, relève le Dr Fontanet. Pour aller au delà, ils ont besoin d'"hôtes intermédiaires" plus proches de l'homme comme le porc, la volaille ou des moustiques, et de conditions favorables.
La grippe aviaire H5N1 est ainsi apparue dans le sud de la Chine, dans des zones fortement peuplées et à forte densité d'élevage de poulets. Le coronavirus à l'origine du SRAS (ou syndrome respiratoire aigu sévère) qui a provoqué une grave crise sanitaire mondiale en 2003 et fait près de 800 morts principalement en Asie, a pu migrer de la chauve-souris vers l'homme grâce à des civettes sauvages élevées pour fournir des restaurants de Canton.
Réchauffement climatiqueLa déforestation conduit à rapprocher les animaux sauvages des zones habitées tandis que le réchauffement climatique favorise la multiplication des moustiques dans des régions où ils étaient inconnus jusqu'alors. C'est notamment le cas des virus de la dengue et du chikungunya véhiculés par deux moustiques, dont le moustique-tigre (ou Aedus albopictus), longtemps cantonné à l'Asie du sud-est, mais qui est désormais implanté sur le continent américain et dans une partie de l'Europe.
Pour le Dr Fontanet, toutes les conditions sont réunies pour le chikungunya, un virus apparu d'abord en Afrique de l'Est et en Inde, et qui frappe désormais les Caraïbes, se propage à l'avenir dans tout le continent américain. Quant au virus Ebola, découvert en 1976 lors de deux flambées simultanées au Soudan et en République démocratique du Congo (ex-Zaire), il n'inquiétait pas exagérément les spécialistes jusqu'à l'épidémie actuelle.
"Autrefois, l'infection était limitée à quelques villages et il y avait une telle mortalité que le virus s'épuisait et que l'épidémie s'arrêtait d'elle-même", rappelle le Pr Delfraissy. En touchant les villes de plusieurs pays de l'Ouest de l'Afrique, le virus est devenu une menace pour les populations concernées, confrontés à des systèmes de santé très défaillants, alors même qu'il ne se transmet que par contact direct avec des personnes infectées et non par voie respiratoire, comme ce fut le cas pour le SRAS.
Selon les experts, Ebola a de ce fait peu de chances de s'étendre facilement à d'autres régions du monde. "En y mettant les moyens et notamment en isolant les malades, l'épidémie devrait pouvoir être contenue dans les 3 à 6 mois", estime le Dr Fontanet.
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