La sécheresse est-elle toujours d'actualité ?mardi 9 mai 2023
Des sols humides en surface, mais pas en profondeur
La succession de perturbations que nous connaissons ces dernières semaines a apporté
des cumuls importants sur la majorité de la France, permettant une humidification bien efficace des sols superficiels sur de nombreuses régions. Indice d'humidité des sols sur la France au 7 mai 2023 – Météo-France
Ainsi,
les sols sont bien humides en surface sur une majorité de la France et certaines régions observent même des indices d'humidité des sol
s parmi les plus importants observés au début du mois de mai depuis 1985. C'est par exemple le cas de Paris où celui-ci est proche des records pour un début mai alors qu'il se trouvait particulièrement bas au début du mois de mars.
Evolution de l'indice d'humidité des sols à Paris depuis le 1er janvier 2023 – Météo-France
Toutes les perturbations successives de ces dernières semaines ont donc permis de
grandement améliorer la situation de sécheresse agricole (entre 0 et 40cm de profondeur) sur la Bretagne, une large partie du Sud-Ouest et du Nord ou encore le Nord des Alpes. La situation reste toutefois plus compliquée sur le Sud-Est de la France qui est resté largement à l'écart de ce temps régulièrement perturbé avec
des sols encore particulièrement secs, notamment entre l'Ouest de la région PACA et le Languedoc-Roussillon. Toutefois, si la situation s'est améliorée en surface, le constat est différent plus en profondeur. Il convient en effet de différencier
la sécheresse de surface (ou agricole), qui s'est bien améliorée sur de nombreuses régions ces dernières semaines et
la sécheresse en profondeur (sècheresse hydrologique) qui est toujours importante en ce début mai.
Les différents types de sécheresse en France – tiré du livre METEO EXTREME
En effet, les précipitations successives depuis le mois de mars dernier ont été
suffisantes pour combler le déficit d'humidité en surface mais celui-ci était
bien trop important en profondeur. Une majorité des nappes phréatiques présente encore
des niveaux plus bas que la moyenne actuellement sur notre pays, notamment entre le Nord, le Centre et sur une large moitié Sud du pays alors que les sols de surfaces sont bien humides sur ces régions.
La situation est toutefois plus encourageante entre la Bretagne et certains secteurs des frontières du Nord-Est où les nappes ont retrouvé des niveaux supérieurs à la moyenne, limitant grandement le risque de sécheresse pour cette été.
Etat des nappes d'eau souterraines en France au 9 mai 2023 - Info-secheresse
Ce manque d'eau en profondeur est consécutif à
un hiver anormalement sec sur notre pays mais également
aux mois précédents qui se sont majoritairement montrés déficitaires. Pour rappel, l'année 2022 fut l'une des plus sèche en France depuis le début des relevés.
Cette année anormalement sèche et le manque de pluie en hiver a apporté
une saison de recharge des nappes (entre l'automne et le début du printemps) globalement déficitaire et ce malgré les pluies récurrentes de ces dernières semaines (notamment en mars), qui n'ont
pas été suffisantes pour combler le déficit accumulé en profondeur. Anomalies mensuelles de précipitations sur la France depuis janvier 2022 - Météo-Villes
De plus, la végétation florissante du printemps empêche également
un bon écoulement des eaux de surfaces vers la profondeur car les végétaux puisent l'eau pour continuer leur développement pendant le printemps. Ainsi, contrairement à l'hiver,
les pluies de ces dernières semaines n'ont que trop peu pénétré les sols en profondeur pour garantir une bonne recharge des nappes avant l'été. Ainsi, si
la situation de sécheresse de surface s'est grandement améliorée en France en ce début mai,
le constat est encore peu encourageant en profondeur où la sécheresse persiste, ce qui pourrait devenir problématique pour l'été sur de nombreuses régions et ce même si les prochaines semaines et l'été pourraient se montrer plus humides que la normale.
Une situation très inquiétante sur le Sud-Est
C'est sur le Sud-Est du pays que la situation est la plus problématique actuellement. En effet,
les perturbations ont majoritairement évité cette région ces dernières semaines et le déficit de précipitations continue de s'accentuer depuis maintenant plusieurs mois. Certaines villes proches de la Méditerranée ont par exemple relevé moins de 25mm entre mars et avril alors que l'hiver s'était déjà montré très sec. C'est par exemple le cas à Nice où on a relevé que
21,1mm, à Nîmes (
21,7mm) ou encore à Marseille (seulement
9,6mm). En comparaison, Rennes a relevé jusqu'à
170,7mm durant cette même période, Bordeaux
145,6mm et Paris
136mm.
A Leucate dans dans l'Aude, le cumul sur une année glissante atteignait
seulement 127mm au début du mois de mai, un déficit de 78% une
valeur digne d'un climat désertique !
Le manque d'eau est flagrant sur de nombreux secteurs du Sud-Est en ce début mai comme ici dans les Pyrénées-Orientales - Via Twitter @BriceGarreau
Ainsi,
les sols sont secs en surface comme en profondeur sur ces régions et l'approche de l'été (saison la plus sèche de l'année près de la Méditerranée) ainsi que l'arrivée des premières chaleurs ne devraient pas arranger la situation, bien au contraire. Sauf période exceptionnellement pluvieuse sur ce secteur d'ici l'été, ce qui reste peu probable,
de nombreux secteurs devraient manquer d'eau avec des conséquences possiblement lourdes pour la nature (risque d'incendie, assèchement de la végétation),
l'agriculture (nombreuses pertes) mais également pour
la population (risque de pénurie d'eau).
La totalité des départements méditerranéens observent déjà des restrictions d'eau en ce début mai et certains secteurs sont d'ailleurs en situation de crise, ce qui ne devrait pas aller en s 'améliorant dans les prochaines semaines.
Arrêtés de restriction d'eau en France au 9 mai 2023 -